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Plumes et pinceaux, BMJD
9 novembre 2018

Conte dans le Sud Algérien de Bernard DELZONS

C’était une soirée d’été très chaude dans un village du sud du Sahara. Tous les habitants étaient réunis dans la palmeraie, dans une sorte de clairière où coulait un filet d’eau apportant un brin de fraicheur. Un vieil homme chantait une chanson, accompagné par des jeunes gens tapant sur leurs tambourins. Les plus jeunes frappaient dans leurs mains. De temps à autre le rythme était cassé par le « youyou » de quelques femmes. Le croassement des grenouilles complétait cet univers musical. Petit à petit, l’obscurité s’approfondit jusqu’à ce que la lune vienne prendre la place du soleil. Tout était paisible. La douce fraîcheur apportait à tous le bien être tant espéré pendant les heures chaudes de la journée. Un jeune homme se leva et commença à danser, mais presque simultanément, un enfant arriva en criant : « venez vite il y a un grand malheur ».

Il faisait maintenant sombre, la nuit était tombée, heureusement c’était une soirée de pleine lune, ce qui permit aux villageois de se diriger vers le village sans utiliser les torches qui de toute façon obligent à marcher très lentement. Au centre du village, il y avait une église construite par les Français et désaffectée aujourd’hui. Elle servait un peu pour tout, et même quelquefois pour une séance de cinéma. Devant la porte, une jeune femme hurlait. Tout le monde reconnut Aicha, la prostituée du village. Elle avait une belle robe rouge parsemée de fleurs bleues. Ses cheveux étaient tressés et lui faisaient comme une couronne sur la tête Officiellement elle n’existait pas, mais tous les jeunes hommes encore célibataires la fréquentaient en cachette. Elle refusait les hommes mariés et de ce fait, les autres femmes du village l’aidaient quand c’était nécessaire.

La malheureuse n’avait pas eu le choix quand l’homme qui lui avait fait un enfant avait quitté le pays sans même lui proposer de l’emmener avec lui. Elle devait nourrir l’enfant. Celui-ci avait maintenant une dizaine d’années et contrairement aux autres enfants du village, il était blond et avait la peau claire.La femme disait que son fils avait disparu dans la soirée. Comme il était malin comme un singe et qu’il savait se faire respecter ça ne pouvait qu’être une fugue, ou un enlèvement.

 

Tout le village se mit à chercher l’enfant, commença Ahmed, frappant à chaque porte pour demander si on l’avait vu et à chaque fois la même réponse, non on ne l’avait pas vu. Il se faisait, maintenant, tard et il fut décidé d’arrêter les recherches qui recommenceraient dès le lever du jour. Aicha criait toujours, inconsolable. Une vielle femme s’approcha d’elle et avec douceur, réussi à la calmer et à la ramener chez elle.

Le jour se levait à peine que les recherches reprirent, d’abord dans le village, puis dans la palmeraie. Les oiseaux se mirent à chanter, profitant de la fraîcheur du matin. Personne ne l’avait vu.

Ils étaient tous dans les jardins quand la cloche de l’église se mit à sonner, ce qu’elle n’avait pas fait depuis le départ des Français. Tous revinrent vers le village pour voir ce qui se passait. En haut du clocher il y avait l’enfant qui chantait : « Je suis Français, je suis chrétien, les cloches sonnent en mon honneur » 

 

Deux adultes sont montés dans le clocher pour faire redescendre l’enfant. Quand ils sont arrivés, celui-ci était en pleurs, prêt à sauter. Il expliqua qu’il voulait retrouver son père et partir loin avec ses parents. Une voiture de la police nationale venait d’arriver dans le village. Avec eux il y avait un Européen que beaucoup reconnurent. Il venait chercher Aicha pour l’amener en Provence où il vivait maintenant. Il n’avait pas pu le faire plus tôt car il avait dû s’occuper de ses parents, mais maintenant qu’il était libre, il voulait savoir si elle accepterait de le suivre. Le petit garçon se précipita sur lui en criant « Ah ! Papa je t’attendais. »

 

Aïcha n’avait pas voulu suivre le Français qui était reparti avec le jeune garçon. Fabien, c’était son nom lui faisait maintenant un virement tous les mois, ce qui lui permit d’arrêter ses activités nocturnes. Elle travaillait pour le village et à l’occasion de certaines fêtes elle chantait et dansait pour tous. Tous les étés, Fabien revenait passer un mois dans le village avec son fils. A la fin du troisième été elle accepta de les suivre et l’on dit qu’il y aurait bientôt un petit frère…

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